
L'artiste
Parfois on pleure, parfois on rit. La vie défile, scène après scène, comme un film dont nous sommes à la fois l’acteur, le spectateur et le réalisateur. Nos yeux capturent ces instants comme une caméra figée sur des fragments d’émotions et les gravent dans la mémoire. À chaque pas, on croise des visages, des amis, des amours, des épreuves. Chaque détail du quotidien devient un choix, une bifurcation invisible vers une réalité différente. Nous vivons tous dans une multitude de mondes parallèles, chacun jouant sa propre partition, chacun avançant à travers une scène unique. Ce qui nous guide ? L’émotion. Le ressenti. C’est eux qui dictent nos choix, eux qui colorent nos souvenirs clairs ou sombres, visibles ou enfouis. Beaucoup partagent leurs joies, mais cachent leurs douleurs. On porte certains souvenirs comme des totems ; on en enferme d’autres dans des coffres qu’on n’ose plus jamais ouvrir.
Et moi, dans ce chaos intime, j’ai trouvé un langage. Une manière de figer, de traduire, d’exorciser. Ma thérapie, c’est la peinture. Les couleurs, les gestes, les matières me permettent de transformer le tumulte intérieur en territoire visible. Chaque toile devient une carte mentale, un repère, une trace d’un passage. Dans de nombreuses traditions spirituelles, l’Ouest est plus qu’un point cardinal : c’est une direction symbolique, le lieu de la fin, de l’invisible, de l’au-delà. Dans mon travail, j’entoure systématiquement le mot “WEST”, comme on cerclerait un secret ou une vérité intérieure. Ce n’est pas une fuite que je peins, mais une quête d’orientation. L’ouest devient un espace émotionnel, un cap intime que l’on tente d’atteindre.
Les visages que je trace sont bruts, déformés, expressifs ils incarnent cette tension entre ce qu’on ressent et ce qu’on montre, entre l’être et l’image. Les mots, eux, vacillent : affirmés, raturés, incertains. Ce n’est pas de la dénonciation, c’est de la cartographie intérieure. Le langage visuel est volontairement instinctif, presque enfantin, pour laisser parler l’instinct, l’urgence, l’émotion. Ce que je cherche à peindre n’est pas “beau” au sens classique, mais viscéral. Authentique. Vrai. C’est le film d’une vie intérieure, projeté sur la toile. C’est ma manière de marcher vers l’ouest